Vous ne comprenez pas pourquoi tel problème persiste malgré votre persévérance à tenter de le résoudre. Vous êtes à cours de solution pour vous sentir compris(e), entendu(e) ou reconnu(e) et vous êtes fatiguée de répéter toujours la même chose, sans résultat ? Si c’est le cas, vous êtes peut-être victime de ce que j’appelle le syndrome du « toujours plus de la même solution ».
« Toujours plus de la même solution », est-ce de la persévérance ? Non
Comment ?! Ressayer encore et encore de résoudre un problème, ce ne serait pas de la persévérance ? Commençons par quelques exemples.
Une solution que j’avais adoptée enfant
Petit, lorsque ça n’allait pas, je me renfermais sur moi-même. Cette tendance s’est accentuée à l’adolescence. Du coup, moins ça allait plus je me repliais et moins je sollicitais d’aide plus je voulais me « débrouiller tout seul ». Du coup, les choses ont empiré, jusqu’à ce que je décide de fonctionner autrement. Avec le temps, j’ai compris que dans mon cas, ce fonctionnement était lié à une peur d’être abandonné ou rejeté.
Du coup, ce qui était au départ une solution face à une peur, était devenu source de souffrance ainsi que d’une grande solitude. Et plus je faisais preuve de persistance dans cette solution, moins ça allait.
Voyons un autre exemple, plus trivial.
La solution que nous avons tous utilisée au moins une fois
Pensez à la dernière engueulade que vous avez eue avec un proche. Et demandez-vous comment s’en est arrivé là.
En général, l’un des deux veut faire comprendre, admettre ou voir quelque chose à l’autre. Il ou elle l’exprime alors d’une façon, certes, plus ou moins adéquate.
En réponse, l’autre ne comprend pas, n’admet pas ou n’accepte pas. Du coup, le premier, agacé, répète le même message un peu plus fort. De façon surprenante, le deuxième ne change pas d’avis et peut même s’agacer.
Et que fait-on alors ? Preuve de persistance.
On répète à nouveau la même chose, encore un peu plus fort (avec l’espoir qu’il ou elle comprenne enfin !). Étrangement ça ne marche toujours pas…
Alors on s’énerve vraiment et on répète encore une fois, encore plus fort. Et d’ajouter selon l’humeur, une petite remarque constructive telle que :
- « Mais en qu’elle langue il faut que je te le dise pour que tu comprennes que… (et rebelote) ?! » ;
- « Mais tu ne comprends vraiment rien, je te dis que… (et rebelote) » ;
- « c’est incroyable de pas comprendre ça ! Je te dis que… (et rebelote) » ;
- « Tu le fais exprès ?! je te dis que… (et rebelote encore une fois !) » ;
Ce qui se traduit en général par une rupture du « dialogue », agrémentée parfois du parachutage de quelques vieux dossiers supplémentaires, sources d’encore plus de discorde.
Il semblerait que « plus de la même solution » ait, au grand étonnement de tous, entraîné plus du même résultat.
[alert-note]En sommes, nous avons une fois de plus confondu persistance et persévérance.[/alert-note]
« Le problème, c’est la solution »
C’est ce qu’a formalisé Paul Watzlawick, psychologue et pionnier des thérapies brèves dans les années 50 (fondateur de la fameuse école de Palo Alto).
En gros, l’idée est que lorsqu‘une solution ne fonctionne pas, nous avons le réflexe de la répéter en l’accentuant.
Seulement, à notre grande surprise, répéter plus de cette même solution engendre en général :
- plus du même problème ;
- ou d’autres problèmes ;
- ou alors les deux.
Ça vous étonne ?
Einstein lui, avait compris bien la différence entre persistance et persévérance, lorsqu’il a déclaré :
La folie, c’est de se comporter de la même manière et de s’attendre à un résultat différent.
Il ajoutera en 1963 :
Ce n’est pas avec ceux qui ont créé les problèmes qu’il faut espérer les résoudre.
Bien que ce propos soit politique, il est parfaitement transposable au plan psychologique ! En somme, c’est en changeant de solution qu’on résout le problème. Et Watzlawick en a fait un fondement des thérapies brèves dites « centrées sur les solutions ».
Entre Amour et travail : le prix de la persistance pour Carole* et Epiphanie*
Responsable administrative de 45 ans, Carole avait passé ses dernières années à faire d’importants sacrifices pour son employeur.
Elle y trouvait en contrepartie de la reconnaissance ainsi qu’une place valorisante au sein de l’entreprise. Seulement, sa « boite » été rachetée et la nouvelle direction n’a pas du tout eu le même positionnement.
Face à cela, Carole a persisté à travailler très dur pour retrouver une place. Deux ans après, elle faisait un burn-out suivi d’une sévère dépression. C’est le lourd tribu qu’elle a payé pour sa persistance dans la même solution. Et c’est suite à cela que l’on s’est rencontrés.
Quant à Epiphanie, une jeune femme de 32 ans pleine d’énergie, son conjoint était sur le point de la quitter. Elle marchait sur « des œufs », faisait le maximum pout être « parfaite » à ses yeux et se remettait profondément en doute. Mais rien n’y faisait, ça se passait mal, elle était désespérée et dans l’incompréhension la plus totale.
Quelle a été sa surprise de voir que lorsqu’elle a arrêté de tout faire pour le satisfaire, les choses se sont inversées. Son conjoint s’est adouci et a même commencé à lui « courir après ». On dirait bien que la persévérance à chercher une solution sans persister dans le même solution à pour elle porté ses fruits.
Cela n’a pas empêché qu’environ trois semaines après, elle se fixe une date limite pour voir si cet homme lui convenait vraiment. Comment cela se fait-il ? Du fait d’écouter et d’assumer ses propres besoins, elle commençait à se rendait compte qu’il n’était peut-être pas en capacité de les satisfaire.
Mais pourquoi persister autant avec une solution qui ne marche pas ?
Tout simplement parce qu’elle a fonctionné par le passé. Plus précisément, ces solutions nous ont permis:
- D’éviter certaines souffrances (peur, tristesse, abandon, déception, violence, etc.) ;
- Ou d’obtenir de la satisfaction ou du plaisir (de la reconnaissance, de l’affection, de la tranquillité, etc.) ;
- Surmonter certaines difficultés ou épreuves
En fait, elles nous ont permis de répondre à des enjeux émotionnels forts.
Nous avons du coup intégré ces solutions, qui sont devenues des sortes de réflexes inconscients, au point même d’en imprégner profondément notre personnalité.
[alert-note]La persistance et avant tout un réflexe, alors que la persévérance est le fruit d’une volonté consciente.[/alert-note]
Le prix de la confusion entre persistance et persévérance
Seulement, la persistance dans toujours plus des mêmes solutions à un coût.
En effet, toute solution une contrepartie en en inconvénients directs avec des répercutions. D’autant plus que dans notre cas, ces solutions « réflexes » on nécessité de se cacher à soi-même :
- Des émotions (comme la peur, de culpabilité, la honte, etc.) ;
- Certains besoins (se sentir soutenu, avoir de l’affection, être reconnu) ;
- les besoins et ou les ressentis de proches ;
- Et encore bien d’autres choses…
[alert-note]Le problème est que pour maintenir la solution, on est obligé de maintenir le voile.[/alert-note]
S’ajoute alors aux premiers inconvénients, le fait que continuer à éviter certains ressentis ou à nier certains aspects de nous-même, génère des tensions internes. Ces tensions s’accumulent dans le temps, ce qui favorise le développement d’angoisses et la rigidification de certains traits de caractère.
À la longue, cela peut entraîner des difficultés émotionnelles ou relationnelles ainsi que l’exacerbation de problématiques plus anciennes. Cela peut conduire à terme à un mal ainsi que des perturbations plus importantes. Certains d’entres-nous somatisent même au point d’avoir de graves problèmes de santé ! Le pris de la confusion entre persistance et persévérance est parfois très lourd.
Mais « J’ai vraiment tout essayé, il n’y a pas de solution » : Faux
J’entends parfois cela dans les premières consultations.
En fait, on constate presque à chaque fois que la personne a effectivement tout essayé, dans un certain sens. Je m’explique :
- « J’ai tout essayé pour que les autres me reconnaissent comme quelqu’un de bien ». En fait, j’ai surtout essayé le genre de solution qui implique de dépendre du jugement d’autrui.
Ou alors :
- « j’ai tout essayé pour me prouver ma valeur ». Oui, j’ai essayé tous les moyens possibles de me prouver ma valeur. Que se passerait-il si j’acceptais le fait que j’ai de la valeur indépendamment de mes « réussites » et de mes « échecs » ?
[alert-note]On voit ici que nous avons d’abord tendance à « tout essayer » dans un certain genre de solution.[/alert-note]
Cela peut paraître un peu subtil mais c’est CAPITAL.
« Toujours plus de la même chose » est en réalité « toujours plus du même genre de solution ». Pure folie diraient Watzlawik et Einstein !
Comment me libérer ?
Le premier pas serait d’accepter que je me cache des choses pour ne pas souffrir ou obtenir certaines satisfactions. Ensuite, envisager le fait qu’il y a des solutions, des façons de faire différentes, que je n’ai pas encore vues.
On peut ensuite prendre le temps de repérer le genre de solution qu’on utilise spontanément, ainsi que le genre de souffrance qu’on évite ou de plaisir qu’on retire.
Prenez le temps d’observer, sans forcément essayer de changer les choses tout de suite. Déjà, vous allez prendre du recul. Puis ensuite, essayer de changer un petit quelque chose et surtout, sans aspirer immédiatement à un résultat optimal !
Si après un certain temps, ce n’est toujours pas satisfaisant. Faites preuve de persévérance et non de persistance ! Peut-être faudra-t’il envisager une nouvelle solution ?!
Il peut s’agir, par exemple de compléter ce travail avec une méthode de psychothérapie adaptée. Mais cela peut-être tout autre chose, comme en parler à une personne impliquée ou au contraire lâcher prise si vous étiez en lutte avec quelque chose. Vous pouvez aussi vous documenter, faire des recherches pour trouver des activités ou des méthodes qui peuvent aider, etc. 😉
Pour trouver un bon thérapeute ou en savoir plus sur les psychothérapies, cliquez sur ces deux liens.
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Merci et à bientôt,
Karim
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Article intéressant merci Karim!
Bonne chose que de faire référence à ce comportement du genre humain et à comment en sortir…
Ce qui est sûr c’est que ça marche, je vous fais part d’un exemple qui m’est propre :
J’ai récemment adopté un comportement différent avec l’un de mes proches. C’est à dire que j’ai toujours eu tendance à croire que nos proches sont ceux qui nous comprennent le mieux, voire qui nous devinent. J’ai de nouveau eu la preuve que non (ce n’est pas parce que je sens bien les choses que c’est cas de tout le monde) et cette fois précisément, après une remarque complètement à côté de la plaque me concernant, je me suis dit « non mais attends.. prends un autre chemin » et cette fois-ci précisément, j’ai remballé mon impulsivité qui aurait donné « mais comment tu peux dire ça tu ne comprends toujours rien ou quoi?! » et j’ai changé pour une explication en douceur, avec les mots qui exprimaient bien ce que je ressentais. Le retour n’a été que le miroir de ce que j’ai projeté. La citation « l’autre n’est que le miroir de soi-même » a pris tout son sens…
J’ai insisté sur le « cette fois-ci précisément » car c’est un travail pour que cela devienne naturel…
Merci pour ce témoignage Caroline !
Cet article me parle bcp car justement je veux éviter de faire de la même chose dans un parcours qui dure longtemps et qui n’a pas encore abouti ….il me tarde de le couronner avec le succès et je suis déterminée !!
La personne qui me suit dans ce parcours m’a demandé de ne pas « m’entêter » dans une direction dans laquelle j’ai eu plusieurs échecs. Du coup je me suis vraiment posé la question est-ce que je suis quelqu’un qui est entêté (persistant) ou quelqu’un de persévérant.
Je me suis toujours vu comme quelqu’un d’ assez persévérant dans la vie. En tout cas j’ai réussi de réaliser des choses qui ont été très importantes pour moi… pas facilement et parfois avec des efforts considérables. C’est banal peut-être mais j’ai eu mon permis de conduire au bout de 5 tentatives: j’ai été tellement stressée chaque fois que je perdais mes moyens et je n’arrivais pas à rester calme pour prendre des bonnes décisions sur la route. Du coup, 5ème fois j’ai pris un petit peu du Liqueur d’alcool pour me déstresser et …j’ai eu mon permis cette fois ci !
L’école de Palo Alto dit que nous devons parfois aller chercher des solutions dites paradoxales (et justement pas des solutions de bon sens) pour résoudre notre problème. Mon exemple avec le permis le démontre. Qui prend de l’alcool pour aller passer l’exam de conduite?!!
Comment savoir si les solutions qu’on tente sont assez différentes des précédentes pour obtenir un résultat différent?
C’est la question que je me pose car là j’ai vraiment envie de voir un changement et j’en peux plus de la même chose!!!
Merci Iva pour ce beau témoigne et cette question (elle pourrait fait l’objet d’un article à part entière!).
En fait, on vise à prendre le contre-pieds de ce qu’on essayé de faire jusqu’à maintenant. Et pour savoir si c’est assez différent, on peut essayer de voir si on prend le contre-pieds au niveau :
– De l’action elle-même (faire l’inverse ou quelque chose de radicalement différent) ;
– De l’état d’esprit dans lequel on fait l’action, même si l’action reste la même (le but de l’action, les attentes, le rôle qu’on prend, le combat qu’on mène, etc.)
Par exemple :
– Si jusqu’à maintenant j’ai essayé d’obtenir de la reconnaissance ou de me faire accepter en faisant tout pour faire plaisir aux autres ou ne pas les décevoir, que se passerait-il si je cherchais un moyen de me détacher du regard des autres et faire des choses pour moi ?
– Si jusqu’à maintenant j’ai tout fait pour éviter le conflit pour que tout le monde soit bien autour de moi (par exemple), qu’est-ce que cela permettrait si j’arrêtais de jouer ce rôle de médiateur/sauveur ?
– Si je n’ose pas faire quelque chose et qu’en même temps j’ai peur de regretter de ne pas l’avoir fait, je peux prendre le contre pieds en y allant, mais pour m’assurer que ce n’est pas la bonne solution. Ainsi, plus tard, je ne regretterai pas de ne pas avoir essayé, tout en ayant laissé une chance à ce que ce soit possible.
– etc.
Voilà j’espère que cela répond assez clairement a votre question.